Je me réveille sur un tapis de mousses, de lychens et de fougères tassées. Une sorte de matelas vert mou et doux. 
La rosée perle sur mes cils, j'ai dû passer la nuit en ce cocon naturel, en cet abri sylvestre moelleux et accueillant. Les gouttelettes d'aurore ruissellent sur mes paumettes rougies pas le froid, coulent dans mon cou et plongent dans le tissu de mon habit. Je regarde la goutte  se fondre et pénétrer au sein de la matière en une petite tache foncée.
Je plisse les yeux en regardant autour de moi. Tout est émerveillement et enchantement. Des troncs fort et rugeux s'élèvent vers la voûte de branchages et de feuillages, tels des piliers magistrales tendu entre les cieux et ma forteresse de bien-être. La brume faiblissante qui m'enveloppe me plonge dans une torpeur jouissive. Je me découvre une propension à la paresse et à la contemplation.
Le toit de verdure est transpercé de rayons lumineux dissipés et blafards. Le soleil se cache, mais je peux le voir scintiller au delà des feuilles.
Au lointain, le martellement d'un pic, l'envol de bergeronnettes, le tintement d'une sitelle, le frottemement des élytres d'un scarabée, les senteurs forestières, le parfum chavirant des fleurs sauvages, la clareté diaphane, le gargouilli d'un ruisseau,... résonnent sur les écorces et emplissent la forêt. 

Un bruissement sur ma gauche attire mon attention perdue dans un monde intangible de bonheur qui embaume mon âme. Un jeune marcassin sort en titubant maladroitement d'un buisson. Il a le poil éparse et mat des jeunes de la portée du printemps. Son pelage à la  teinte châtain n'est pas dru, c'est encore un duvet couvrant une peau rosâtre de porcelet. Je scrute ses yeux profonds et apeurés, ses globules humides, ce regard questionnant.

Derrière moi, un grognement, je me retourne lentement et découvre un sanglier visiblement parent du petit sorti des sous-bois. Il se tient fier à quelques pas de moi. Il est nettement plus terne que son jeune, plus noir, le poil ras et luisant. Deux dents jaunes démesurées au groin, les muscles tendu, bandés, saillants, puissants, parcourus d'un tic nerveux qu'ont les bêtes constamment sur le qui-vive, il me dévisage avec insistance.

Le temps semble s'être arrêté à l'instant, la forêt s'est tue, les sentations de volupté et d'harmonie se sont dissipées, remplacées par un malaise plombant doublé d'un sentiment d'intrusion.
Chaque pensée, chaque vision, chaque touché est un exploit biologique. Mon système nerveux est exacerbé. Ma peau est pressée par l'ambiance qui règne désormais en ce lieu devenu prison. La pesanteur m'opresse, l'air semble trouer ma peau, pénètrer en moi par tous mes pores, la lumière me transperce de toutes parts, la douleur tant morale que physique est insoutenable, finalement mon esprit chavire et Morphée me rapelle auprès de lui.

Texte #2: vocabulaire et imaginaire.

Je marche, silencieux sur le sable chaud qui brûle la plante de mes pieds nus. C'est ce contact avec la nature qui me rend muet. Un retour aux instincts primaires, aux sensations primitives et animales. Je me laisse aller là où me portent mes pas, tantôt éloigné de la mer par une dune, tantôt rapproché, les pieds dans l'eau.

Je respire à grandes goulées. J'avale, j'aspire, je m'empli de l'air marin, vif, aux senteurs subtiles et variées. J'hume avec bonheur les parfums côtiers. Je suis plongé dans un univers d'odeurs salées, chaudes et humides à la fois. Les algues pittoresques, échouées sur l'estrang, dégagent des relents poivrés de leurs feuilles dorées aux soleils. 

Les herbacées rares qui courent entre les dunes, bruissent sous un vent modèré suffisant pour porter les mouettes dans leurs jeux de voltige aérienne. Majestueux, élancés et habiles, ces maitres du ciels virevoltent librement. Rien n'a l'air de pouvoir  les troubler. Ils fuient en piqué, redressent grâce à un courant ascendant puis tourbillonent, magnifiques, pour plonger à nouveau.
Je me plaît à contempler ces oiseaux fascinants, couché sur la plage, face à la mer turquoise.

Mon esprit vogue sur les flots d'une rêverie provoquée par les embruns. 
J'écoute le clapotis de l'eau que la marrée entraine dans un rouli monotone. Je me laisse bercer par les bruits alentours: le cris d'une mouette, le froissement des feuilles, le craquement d'un palmier, une bourasque de vent,....

Je regarde le ciel à présent, apaisé par le cadre idylique qui m'entoure, par l'ambiance chaleureuse d'une nature avec laquelle je communie et qui communique tant avec mon corps physique qu'avec mon âme intangible, déjà lointaine. 
Je contemple ces nuages pâles, ces trainées blanches qui moutonnent dans un bleu uni, hypnotisant, infini.... cette ouate céleste et fragile chahutée au gré du vent, qui me plonge dans un état somnolent et finalement m'entraine dans un sommeil sain et régénérateur.